Si la démocratie peut être participative, il est une discipline qui doit l'être plus encore : l'écologie. Hélas, trop de commentaires et de réactions montrent que le chemin est encore long et difficile vers un changement global des mentalités et surtout des comportements.
Le discours général.
L'on entend souvent, trop il me semble, que l'enjeu du XXIe siècle est " de sauver la planète et respecter l'environnement pour l'avenir de nos enfants". Je crois qu'il faut adopter au plus vite un argumentaire, certes peu différent sur le plan lexical, mais radicalement opposé si l'on considère l'impact de ces quelques mots sur la population. Car ce n'est pas notre planète que nous cherchons à sauver. La Terre a connu par le passé de profonds bouleversements naturels et de grandes extinctions d'espèces. La vie s'est toujours remise. C'est la force de la biodiversité. Et même si nous lui portons gravement atteinte depuis 1 siècle, c'est bien notre espèce qui court à sa disparition. Et ce très rapidement.
Ce n'est donc pas non plus pour les générations futures que nous agissons. L'échéance est bien plus courte qu'on ne laisse croire. Il est fondamental de faire passer le message que l'action doit être immédiate et forte, globale et individuelle.
En effet, il faut par ailleurs diffuser avec conviction l'idée selon laquelle l'action individuelle est au moins aussi fondamentale que l'action au niveau des états. Car le véritable acte de démocratie populaire est aujourd'hui individuel. Pour se faire, il faut adopter le discours précédent et mettre en place des mesures incitatives fortes. Ce qui amène le développement aux points suivants.
Les mesures incitatives
La taxe CO2 : Elle est mal perçue par le public. Pourtant nécessaire, nous n'avons que trop de retard dans ce domaine et le choix de ne taxer la tonne de CO2 qu'à 17 euros n'arrangera rien à la chose (La Suède en est à 100 euros). Nous devons tous la payer, sans condition de salaire, en fonction de notre impact écologique réel. C'est absolument essentiel. Si des passe-droits existent, nous ne résoudrons jamais le problème. En revanche, il faut l'associer à une mesure incitative sous forme de prime. Un exemple. J'ai un véhicule 7 places qui produit 196g de CO2 au kilomètre. Je vais donc payer une taxe élevée. Mais il faut pondérer cela par le fait que je transporte 5 personnes. Je pollue donc peu en réalité. Il serait aisé de considérer le quotient familial et le nombre de kilomètres annuel pour estimer l'empreinte CO2 d'un foyer fiscal. Sous un certain plafond, une prime serait allouée sous forme de réduction (ou de remboursement) d'impôt. Ainsi, la mesure serait plus juste pour ceux qui font des efforts. Ainsi, un foyer qui possède plusieurs voitures et plusieurs conducteurs-passagers globaliserait également son empreinte écologique. Ces mesures sont me semble-t-il assez simples à mettre en oeuvre, lors d'une déclaration d'impôt sur le revenu par exemple... Pour ce qui concerne les transports en commun ou le covoiturage, un individu contraint d'utiliser son véhicule pour ses déplacements professionnels pourrait être partiellement exonéré (il est primordial que l'exonération ne soit pas totale). Cette personne déclare normalement ses dépenses au titre des frais réels. Elle est donc facilement identifiable. Là encore, ceux qui font l'effort d'utiliser les transports collectifs (bus, trains, covoiturage...) ou propres (vélo, marche...) se verraient allouer une gratification. Hélas, des passe-droits existent bien dans la nouvelle proposition de loi. Ils bénéficient aux professionnels, aux entreprises. Si le surcoût engendré dépasse le 30% des coûts de production ou d'exportation d'un produit, l'entreprise est exonérée. Ce qui vient s'ajouter à la possibilité d'acheter des droits à polluer pour les plus riches. De cette manière, 90% des professionnels français seront écartés de la mesure. Non seulement cette taxe n'aura pas l'effet escompté pour tordre le cou aux vieilles traditions françaises, mais elle sera de plus endossée par les foyers qui ne représentent qu'une faible part de l'empreinte écologique de notre pays. Comment alors, répercuter le véritable coût environnemental sur une denrée qui voyage sur des milliers de kilomètres, alors que des productions locales pourraient être favorisées ? Comment mettre fin au cortège interminable des camions qui sillonnent l'Europe, alors que le ferroutage pourrait devenir la solution à la fois la plus écologique et la plus économique ?
Gestion de l'eau : Une mesure similaire peut être appliquée pour la consommation d'eau. Pour les mêmes raisons que précédemment, les efforts d'une famille peuvent être récompensés par une prime à l'économie d'eau...
Dans un registre un peu différent, il faut absolument que l'agriculture se mette au diapason de l'économie. Il faut taxer l'arrosage de jour (évaporation de 80% au soleil), et récompenser les agriculteurs qui choisissent des modes d'arrosage raisonnés (les économies potentielles réalisées sur les fuites représentent plus que la consommation d'eau des ménages) ou des cultures adaptées au climat local. C'est en ce sens que la PAC doit être profondément revue, afin que les subventions (nos impôts) soient allouées à ceux qui produisent de façon raisonnée.
Electricité... Gaz... Déchets... voilà encore d'autres domaines pour lesquels de telles mesures sont également applicables. Je suis convaincu qu'un peu de réflexion et de travail donneraient rapidement des éléments probants en faveur de telles mesures. En ce qui concerne le logement le travail est plus difficile encore. Combien de constructeurs, d'architectes ont-ils amorcés la mutation vers l'habitation bioclimatique ou tout au moins respectueuse des règles édictées dans la loi dite de Grenelle de l'environnement ? Une habitation est faite pour durer... Ceux qui font le choix aujourd'hui de construire de façon "traditionnelle" paieront un jour lourdement leur choix (taxes, coût de l'énergie). Car la consommation énergétique moyenne est de 150 kWh/an/m². En 2020, elle devra être inférieure à 50 kWh/an/m². Pourquoi les aides sont-elles si faibles pour encourager le particulier et le professionnel à changer de comportement ? Dans l'euro-région sud-ouest, ce sont 400 000 logements qui doivent être mis aux normes tous les ans si l'on veut être conforme à la loi en 2020... Que se passe-t'il en réalité ?
Financement du plan de relance
La crise que nous traversons est le grave symptôme d'un système économique malade de ses abus et de ses perversions. Il est de plus responsable du désastre humain et écologique dans lequel nous nous trouvons. Imaginer un plan de relance basé sur les marchés financiers serait une façon de nous emprisonner durablement dans ce modèle qui a de longue date montré ses limites. Nous lui serions ainsi redevable financièrement durant plusieurs décennies, probablement avec intérêts. Ce serait de plus justifier son existence et empêcher pour longtemps toute initiative d'évolution vers un système dont l'humain serait le centre. Les lobbys financiers des groupes automobiles et pétroliers sont tout puissants. Il est impératif de ne pas s'aventurer dans cette voie sans issue. Seules des financements publics peuvent offrir de réelles garanties de réussite et d'indépendance, même s'ils sont synonymes de déficit. Car, si l'investissement est aujourd'hui important, le retour pourra être évalué en terme de qualité de vie, paramètre qui n'est pas considéré aujourd'hui dans les modèles économiques capitalistes.
À l'heure où nous fêtons en terre toulousaine les 150 ans de la naissance de Jaurès, je crois que l'homme des grandes causes qu'il fut aurait été de ce combat vital bien au-delà de nos frontières.